Ce ne sont pas les écrivains qui écrivent le mieux.
Ce sont les peintres ou les sculpteurs quand ils tiennent
un carnet pour leur seul besoin : ils écrivent alors
sans même s’apercevoir qu’ils écrivent,
ne cherchant que la justesse avec la rapidité.

Christian Bobin
In Mozart et la pluie

samedi 31 octobre 2009

Un événement culturel phare de l'automne azuréen



De Carros à Vence, rencontres croisées à la découverte de l'œuvre d'André Marzuk

L'artiste a beau être implanté à Nice, c'est en rive droite du Var que son œuvre s'épanouit cet automne, au fil de deux expositions complémentaires présentées simultanément à Vence et à Carros. Dans sa pratique artistique contraire aux modes de notre temps comme dans sa manière d'affirmer une démarche d'écologie de la pensée à rebours d'une certaine conception de la modernité, André Marzuk ne peut laisser indifférent. Les deux brillants vernissages qui se sont récemment tenus dans le moyen pays témoignent de cette singularité rafraîchissante dans le milieu de l'art contemporain.

Tout d'abord, à la Chapelle des Pénitents Blancs de Vence, "Concerto pour deux coeurs" (1) présente le travail le plus récent d'André Marzuk, une série picturale homogène mixant les techniques - graphie, peinture, céramique, etc. - pour constituer un nouvel écrin à des fragments de lettres d'amour, perpétuant ainsi l'échange intime dans la sphère publique par le biais de la transfiguration artistique. Réalisé sous l'égide de "Art, culture et patrimoine", cet accrochage soigné s'accompagne de la publication par l'artiste d'un très beau catalogue, précieux livre d'art porteur d'une ode à la tendresse.

À quelques kilomètres de là, c'est dans les espaces de la médiathèque André-Verdet à Carros que se déploie une rétrospective mettant en lumière 20 ans d'un travail centré sur la coopération de Marzuk avec les poètes, les philosophes et les écrivains qui ont eu un impact sur son œuvre. Cette exposition (2) est présentée par le "Centre international d'art contemporain" qui fonctionne hors les murs durant les travaux de restauration du château. Polylobes, Louanges au Regard, Mémoires des feuilles, Offrande picturale, Traces de lumière, Recueil de silences… Autant de titres qui sont l'occasion de découvrir des séries très diverses, de la virtuosité du dessin à l'opulence de la peinture, dans la nudité d'un trait ou la richesse de la céramique, avec là encore pour point commun le dialogue constant entre unité et multiplicité. Car la déconstruction, la recomposition, l'usage du fragment sont employés ici comme autant de concepts disant à la fois la contemporanéité d'un art et le caractère intemporel de son propos. Et puisque les auteurs - Yvon Le Men, Olympia Alberti, Aimé Césaire, Christian Bobin et tant d'autres - sont à l'honneur, on ne manquera pas d'être emporté par le caractère inhabituel de la présentation des œuvres. En symbiose avec l'environnement de la bibliothèque, la scénographie offre en effet les murs d'exposition comme autant de pages d'un grand livre ouvert sur lesquelles textes, ornementation, tableaux et groupes de tableaux sont composés pour proposer une lecture inédite de ces œuvres.

Simple rencontre avec une beauté hautement classique mâtinée de questionnements plastiques contemporains ou désir de s'immerger dans un volontarisme artistique visant au réenchantement du monde, la visite de ces deux expositions s'impose comme l'un des temps forts de l'automne culturel aux marges de la Côte d'Azur.

(1) Concerto pour deux cœurs (œuvres récentes 2006-2009) - Chapelle des Pénitents blancs, Vence, jusqu'au 1er novembre 2009 (entrée libre)

(2) Tout ce que je sais du ciel, Poètes, philosophes et écrivains dans l'œuvre d'André Marzuk (Rétrospective 1989-2009) - Médiathèque André-Verdet, Carros - jusqu'au 12 décembre (entrée libre).

Rencontre avec l'artiste, projections et débat :
samedi 7 novembre à 14h30 en salle Izzo
(réservations au 04 93 29 37 97)

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